L'artisanat, l'artisan et l'art de la table

18 juin 2021
Par : Denis Courtiade

Le choix de pièces artisanales, esthétiques et/ ou pratiques, doit correspondre avec l’histoire du lieu, des hommes y travaillant, et de la cuisine que l’on y propose.

L’ARTISANAT

Selon la définition de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco)*, sont considérés comme artisanaux les produits fabriqués par des artisans. Soit entièrement à la main, soit à l’aide d’outils à main voire de moyens mécaniques, pourvu que la contribution manuelle directe de l’artisan demeure la composante la plus importante du produit fini. L’artisan assure en général tous les stades de sa transformation, de réparation ou de prestation de services, et leur commercialisation.

La nature particulière des produits artisanaux se fonde sur leurs caractères distinctifs, lesquels peuvent être utilitaires, esthétiques, artistiques, créatifs, culturels, décoratifs, fonctionnels, traditionnels, symboliques et importants d’un point de vue religieux ou social. L’artisanat est source de développement local. Trois catégories sont distinguées : artisanat de production, artisanat d’art, artisanat de service. La loi Royer, en son article 1, précise : « Ils [le commerce et l’artisanat] doivent contribuer à l’amélioration de la qualité de la vie, à l’animation de la vie urbaine et rurale et accroître la compétitivité de l’économie nationale. »

LES ARTISANS

Dans artisan, il y a art, comme dans ouvrier, il y a œuvre. L’artisanat est une profession très exigeante qui nécessite patience et passion. Elle s’apprend dans le temps, avec les yeux, puis avec les mains. Dans un échange constant entre l’esprit et la matière. Faire et refaire forgent l’expérience et mènent à l’expertise du beau travail. Souvent anonyme, c’est avec modestie, mais aussi avec une grande fierté, que l’artisan signe ce qu’il réalise, il s’engage sur son produit. « A l’œuvre, on connait l’artisan », écrit Jean de la Fontaine.

L’ART DE LA TABLE

Toute réalisation artisanale est le fruit d’une rencontre, entre un besoin et une possibilité, entre un demandeur et un créateur. Notre industrie hôtelière entretient depuis toujours des relations très étroites avec ses artisans. Dans leurs plus grandes diversités, la France et ses régions, regorgent de talents. L’artisanat et ce qu’il produit sont des marqueurs de différenciation dans nos espaces de restauration. La concurrence, sans cesse ravivée, oblige donc les restaurateurs à un devoir d’innovation.

STORY TELLING

Qu’ils soient décoratifs ou pratiques, s’équiper d’objets artisanaux doit être fait en cohérence avec l’histoire du lieu, des hommes y officiant, et de la cuisine que l’on y interprète. Choisir un artisan, c’est aussi faire le choix de l’intégrer à la globalité du projet, afin que ses créations aient du sens et une fonctionnalité adaptée. Souhaiter un ancrage local, régional, ou à l’inverse, créer une rupture de repère, les objets de table doivent éveiller les cinq sens et procurer des émotions.

En matières brutes ou naturelles (écorce, coquillage, galet, bambou, etc.) ou bien façonnés par la main de l’homme (verre, céramique, métal, pierre, etc.), uniques ou exceptionnels, d’ici et d’ailleurs, les arts de la table mettent en valeur la vérité des matériaux. Ce que d’autres pourraient appeler une imperfection, pour l’artisan, l’aspérité, le craquelé, le nœud dans le bois, la fissure, etc. sont autant d’éléments qui font le caractère unique des pièces travaillées et c’est peut-être, aussi pour cela que l’on dit que les objets ont une âme. Au restaurant, l’expérience du repas est avant tout sensorielle, elle engage le corps tout entier. Tous les détails comptent. Chaque objet véhicule un ressenti. Le maître d’hôtel est aussi un guide. Avec un vocabulaire travaillé, c’est à lui d’accompagner les clients sur le chemin de la compréhension. Telle ou telle pièce est disposée sur la table pour son aspect décoratif, son originalité, sa préciosité, son utilité... Pendant toute la durée du service, c’est la gestuelle du maître d’hôtel qui va donner vie aux arts de la table en les adaptant aux besoins de ses clients.

Le sommelier et le chef de cuisine jouent, eux aussi, un rôle essentiel dans la sélection de leurs arts de la table. Car au-delà de l’aspect esthétique, le comportement technique de chaque pièce est important. Pour la verrerie et la porcelaine, ils prennent en considération les matériaux utilisés, les formes et les volumes de remplissage, le poids et les capacités thermiques, la transparence et les coloris, etc. afin de tendre à une parfaite cohérence et harmonie, entre le contenant et le contenu.

Nous l’avons bien compris, certaines pièces ont un usage esthétique, d’autres ont une utilisation pratique. Le maitre d’hôtel est un conteur, charge à lui de raconter l’histoire de l’objet en imageant l’artisan et son artisanat.



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