Du 5 décembre au 12 janvier prochains, La Romaine Éditions prend ses quartiers à l’Hôtel des Académi
Le mois de mai ne s’annonce pas comme le “grand soir” pour le retail. Les détaillants n’en peaufinent pas moins leur stratégie de reprise.
Les 3 millions d’entreprises de proximité françaises paient un lourd tribut à la crise sanitaire et économique. 58 % d’entre elles accusent une perte de chiffre d’affaires supérieure à 70 % lors de la 2e quinzaine de mars (source : U2P-Xerfi I+C). Du côté des foyers, 33 % d’entre eux considèrent que leur situation financière s’est dégradée, avec une perte de revenu estimée à 25 % en moyenne (ObSoCo, 3-8/04/2020). Quant à la confiance des ménages dans la situation économique, celle-ci décroche de façon inédite par rapport à début mars selon l’Insee : l’indicateur qui la synthétise perd 8 points, soit sa plus forte baisse depuis la création de l’enquête mensuelle de conjoncture en 1972: à 95, il est au-dessous de sa moyenne de longue période (100).
Du côté des magasins du commerce spécialisé, Procos (fédération pour la promotion du commerce spécialisé) fait état d’un chiffre d’affaires en baisse de - 94 % en avril et de - 37 % entre le 1er janvier et le 30 avril 2020. « L’e-commerce, notamment le click & collect a connu une reprise de dynamisme chez certains acteurs (sport, équipement de la maison, alimentaire spécialisé...) et permet de terminer le mois à -86% en moyenne lorsque l’on cumule magasins et e-commerce », détaille la fédération dans un communiqué du 6 mai dernier. « Chacun est content de rouvrir, de retrouver une vie plus normale, mais la période à venir est celle de tous les dangers pour les commerçants. Il va falloir payer les salaires et les autres charges avec peu de chiffre d’affaires. Cette période rend indispensable la poursuite de certaines aides de l’État dont le chômage partiel pour ajuster les effectifs à l’activité réelle et de trouver des solutions volontaristes d’adaptation des coûts d’exploitation à la situation réelle, en premier lieu sur les loyers bien entendu pour réduire le risque de défaillances et de fermetures », explique Emmanuel Le Roch, délégué général de Procos.
Les avis sur les perspectives de reprise de l’activité convergent : le retour vers un niveau d’activité à la normale prendra du temps dans le retail. « La reprise va être une improvisation permanente, analyse Cédric Ducrocq, président de Diamart group. La capacité à recréer de la confiance sera déterminante. Pour les vendeurs, remettre du relationnel et de l’expérience est difficile quand il faut porter un masque et respecter la distanciation sociale. Il faudra être créatif dans la relation client ! »
C'est une communication inspirationnelle et non commerciale, que EK France proposera aux clients, avec prochainement un dépliant digital présentant une offre estivale : « Le retour à l’essentiel, au made in France, au manger mieux ou sain, l’écoresponsabilité étaient déjà des tendances de fond : nous continuerons de nous y inscrire, détaille Philippe Karmann, directeur général d’EK France, avec une démarche plus globale d’utilité des enseignes par rapport au consommateur. » En outre, les enseignes Ambiance & Styles et Culinarion qui avaient lancé le 12 mars dernier une opération de reprise table et cuisine invitant les consommateurs à ramener leurs anciens articles en échange de bons de réduction (en échange de chaque kilo rapporté, un bon de réduction de 5 € à valoir sur 25 € d’achat), ont repensé celle-ci en raison des contraintes sanitaires actuelles. Elles organisent donc une opération promotionnelle du 13 au 23 mai 2020, en proposant 20 % de remise immédiate sur les produits d'une cinquantaine de marques partenaires (hors petit électroménager et promotions en cours).
Pour Du Bruit dans la Cuisine et Little Extra, la durée du confinement a été l’opportunité d’avancer sur la transformation des enseignes, « avec le souci de la qualité du commerce et d’améliorer le concept à la reprise et non de la date de celle-ci, et de se tenir prêt » souligne André Tordjman, leur dirigeant. A la réouverture, des gammes 100 % revisitées seront proposées aux consommateurs. En coulisses, « nous avons avancé sur le rapprochement des 2 enseignes, notamment sur le digital et la formation (la Little school de l’excellence, une formation internet pour l’ensemble des collaborateurs, avec pour thèmes le modèle économique du retail, la formation aux produits, la gestion, la vente, etc.), la consolidation de la logistique et des systèmes d’information, et l’élaboration d’un biconcept réunissant les 2 enseignes dans un même espace, énumère André Tordjman. Nous espérons un phénomène de reprise, même si nous sommes conscients de la difficulté. Mais nous avons un projet, de la trésorerie et pas d’endettement. Et nous travaillons 2 marchés porteurs pour demain : la cuisine et les cadeaux offerts par empathie pour autrui. » Et de poursuivre : « L’envie de s’équiper pour bien cuisiner, une tendance déjà présente, sera renforcée par la crise ».
La cuisine a le vent en poupe
Pour Fabien Bourly, qui détient 4 magasins dont la Coutellerie et Casserolerie champenoises, hors de question que ses clients retrouvent les mêmes points de vente que ceux qu’ils ont quittés en mars. « Nous avons commandé des nouveautés pour qu’il y ait des découvertes à faire à la réouverture. Depuis mi-avril, nous retrouvons une cadence pratiquement normale sur l’e-commerce, où les produits fonctionnels dominent l’achat plaisir et un panier moyen en baisse. L’important est que les clients n’oublient pas le magasin, y compris via nos newsletters. »
Les restaurants restant fermés et les incertitudes planant sur les grandes vacances, TOC a pour sa part prévu de rouvrir ses portes en mettant l’accent sur le thème “nomade” avec une offre centrée sur le pique-nique. « Nous contactons également les clients TOC et La Bovida par e-mailing aux clients pour les inciter à privilégier, à la réouverture, le click & collect que nous n’avons pas mis en place lors du confinement dans un souci de cohérence avec les mesures imposées par celui-ci », indique Lionel Debus, directeur général TOC/La Bovida.
En mai puis en août, les 2 enseignes proposeront également à leurs clients un “magalogue” en format papier et digital destiné renforcer le lien avec le consommateur et l’inspirer, l’activité e-commerce révélant au cours du confinement un intérêt sur le fait-maison (robot pâtissier, produits autour du pain, etc.). « L'activité e-commerce n’a cessé de progresser pendant le confinement, poursuit Lionel Debus, qui a également le sentiment que l’appétence pour le fait maison se confirmera. Nous avons notamment mis en place la gratuité des frais d’expédition à partir de 39 € d’achat, que nous envisageons de maintenir jusqu’à fin mai. »
L’heure est aussi à la poursuite de l’investissement omnicanal, un axe fort de développement du réseau, pour EK France. La moitié des magasins a réactivé le click & collect depuis le 17 avril, et EK France démarrera sa phase test de ship from store à partir de juillet.
A souligner enfin l’atout de la filière : les Français n’ont jamais autant cuisiné depuis mars, et porté de l’intérêt à cette activité. Ces comportements se conforteront-ils ? « Je ne serais pas surpris d’un soutien de consommation sur les produits culinaires, y compris sur la montée en compétences, conclut Cédric Ducrocq. De même pour l’aménagement du jardin et de la maison. L’art de la table relève davantage de l’achat plaisir, donc bénéficie de moins de leviers actuellement, mais sans doute du plaisir de dresser une jolie table. »
C’est d’ailleurs l’objet du concours proposé par la Confédération des arts de la table en avril au grand public, invitant les internautes à réaliser la plus belle table de confinement en inaugurant sa nouvelle signature “l’art de la table, et la vie a plus de goût”.
A noter que Diamart group et Côté clients lancent un projet d’étude en souscription sur le thème “comprendre les modifications des comportements des consommateurs pour adapter votre stratégie commerciale”.