Dossier

Art de la table : objectifs adaptation et conquête !

03 janvier 2018
Par : Sophie KOMAROFF

Organisé à Orléans en octobre dernier, le colloque de la Confédération des arts de la table a mis en évidence les enjeux auxquels la filière devra répondre ces prochaines années.

Avec un chiffre d’affaires de 4,828 milliards d’euros en 2016 sur le marché français signant une progression des ventes de 4 %, les secteurs des arts de la table et du culinaire font preuve de dynamisme. Cette tendance haussière ne s’était pas observée depuis une dizaine d’années.

Pour autant, au terme des deux jours du colloque de la CAT qui s’est déroulé à Orléans en octobre dernier, le bilan serait néanmoins légèrement contrasté. Oui, un regain d’intérêt pour les objets du quotidien est observé et, oui, le secteur est galvanisé par le secteur professionnel. Du côté de ses effectifs, la filière enregistre aujourd’hui une diminution de 1 % et emploie aujourd’hui 44 000 salariés. Tendance à la baisse également chez les fabricants, qui étaient 533 en 2016, versus 553 l’année précédente.

Les circuits de distribution affichent, quant à eux, 1,284 milliard d’euros pour la consommation professionnelle (dont 901 millions d’euros pour les grossistes, versus 98 millions d’euros pour les dé- taillants et 125 millions d’euros pour les distributeurs internet) et 3,544 milliards d’euros pour la consommation des ménages (dont 3,129 milliards pour les détaillants, versus 275 millions pour les distributeurs internet)*. 

Pourtant, il semble que seuls 25 % des Français nourrissent un intérêt pour les arts de la table (voir les résultats de l’étude Obsoco en pages suivantes). Les 75 % restants seraient non investis sur le sujet. Dont feraient d’ailleurs partie les journalistes traitant de ces sujets avec une méconnaissance des produits, a déclaré l’ex-président de la CAT Guy Bourgeois, lors d’une table ronde réunissant Denis Courtiade (restaurant Alain Ducasse au Plaza Athénée) et Bruno de Monte (école Ferrandi). 

Ce à quoi la rédaction d’Offrir International répond pour sa part par une amicale invitation à (re)lire ses précé- dents numéros, qui ont abordé il y a plusieurs mois déjà certains des thèmes à l’ordre du jour du colloque, mais aussi d’autres dont elle a pu penser qu’ils concernaient son lectorat et plus appropriés à traiter dans un média.


Des consommateurs à sensibiliser et à conquérir

Alors pour « faire la différence » et « aller chercher le chiffre d’affaires de demain » (la baseline du colloque 2017), quels leviers actionner ? Le défi est majeur, y compris pour l’action collective, et consiste à aller conquérir de nouveaux consommateurs, peu sensibles semble-t-il à l’art qui nous concerne. En témoigne par exemple le recul (- 2 % en 2016) du secteur du linge de table aussi bien sur les secteurs professionnels que grand public.

Alain Petitjean, directeur associé de Sémaphores (conseil aux acteurs publics) et intervenant au colloque, a évoqué pour sa part « l’acceptation sincère des nouveaux comportements d’achat, synonymes de nouveaux territoires et de légitimité, et le ré-enchantement de l’expérience d’achat qui deviendrait expérience d’échange, pour une relation client impliquante et passionnée ». Soit un acte d’achat co-construit par le client et le vendeur. Et de souligner que le rôle d’internet et des technologies digitales était second, « l’essentiel reposant dans les attentes sous-jacentes qu’ils permettent d’exprimer ».

Le m-commerce et le e-commerce sont certes en hausse, ainsi que l’a expliqué Olivier Badot, spécialiste du commerce et de la distribution intervenant au colloque. « Mais les points de vente reprennent de la vigueur », a-t-il poursuivi, prédisant un plafond de verre pour le commerce digital. « Ce n’est pas tant la proximité qui a un avenir mais la viscosité, à savoir l’implantation sur les flux naturels et organisationnels du consommateur. Des tiers-lieux regroupant les motifs de déplacement, qui sont des espaces multifonctionnels inscrits dans du patrimoine local. »

Un appel au regroupement 

Du point de vue de l’action collective, les pistes sont de plusieurs ordres : merchandising, omnicanal, service sur le point de vente, export (vers la Chine notamment), a énuméré Thierry Villotte au terme du colloque en insistant sur le pan communication des actions entreprises. « Le CHR est un driver, a analysé le président de la CAT, mais au niveau du grand public, la croissance est préemptée par de nouveaux acteurs, dont Internet ou encore des marques telles que Cyrillus, au détriment des industriels. Le gâteau est partagé par des acteurs de plus en plus nombreux.» Avec une question de fond consistant à faire grossir celui-ci.

Pour cela, un des axes évoqués par le président de la CAT est « l’innovation produits, qui est l’ADN de nos marques », avec un appel aux syndicats de fabricants à s’investir davantage dans les nouveaux process, matériaux et technologies et à se regrouper. Thierry Villotte a de plus renouvelé son souhait de voir les acteurs du culinaire rattachés à la taxe HBJOAT et proposé de modifier le nom de la CAT en Confédération de la cuisine et de l’art de la table.

« L’art de la table relève aussi bien de la solderie que du luxe, a par ailleurs martelé Thierry Villotte. Or, contrairement à la joaillerie et la mode, le luxe ne peut pas jouer son rôle de locomotive sur l’ensemble de notre marché. D’où la notion de #tabling, qui évoque quelque chose de précieux, mais aussi le savoir recevoir, une façon de prendre soin des autres. » Une idée également portée par la blogueuse Nessa Buonomo, intervenante au colloque, qui a pointé l’importance d’Instagram pour les secteurs relatifs à l’art de recevoir.


Favoriser l’émergence des détaillants sur internet 

Le concept #tabling, c’est justement le regroupement de l’ensemble des activités et contenus liés aux arts de la table, à l’instar de ce que le fooding est à la gastronomie. Sa mise en œuvre digitale a pour cible principale, les femmes actives de 35 à 49 ans et les “digital mums”. Max Maarek, directeur du planning stratégique chez Brainsonic, agence spécialisée dans la stratégie et la production de contenus sur les réseaux sociaux qui accompagne la CAT, a indiqué que les actions menées en 2016 seraient poursuivies en 2018, avec également une refonte ergonomique du site www.osezlartdelatable.fr et une réflexion sur une #tabling week, envisagée comme un festival en partenariat avec des acteurs du CHR et médiatiques. Concernant les actions terrains, l’opération Videz vos placards sera renouvelée du 16 mars au 7 avril prochains en partenariat avec Emmaüs.

Enfin, le chantier de l’échange de données informatisées se poursuit quant à lui (voir Offrir International n° 461 en pages 10 à 14), la phase test intervenant en principe au second semestre 2018, pour un déploiement progressif en 2019. « Nous avons du mal à motiver les détaillants dans l’action collective, a reconnu le président de la CAT en guise de conclusion. Mais nous ne leur amenons pas de service. C’est aussi un axe sur lequel il convient de réfléchir. »

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