Avec un chiffre d’affaires de 4,828 milliards d’euros en 2016
sur le marché français signant une progression des ventes
de 4 %, les secteurs des arts de la table et du culinaire font
preuve de dynamisme. Cette tendance haussière ne s’était pas observée
depuis une dizaine d’années.
Pour autant, au terme des deux jours du colloque de la CAT qui
s’est déroulé à Orléans en octobre dernier, le bilan serait néanmoins
légèrement contrasté. Oui, un regain d’intérêt pour les objets du
quotidien est observé et, oui, le secteur est galvanisé par le secteur
professionnel. Du côté de ses effectifs, la filière enregistre aujourd’hui
une diminution de 1 % et emploie aujourd’hui 44 000 salariés. Tendance
à la baisse également chez les fabricants, qui étaient 533 en
2016, versus 553 l’année précédente.
Les circuits de distribution affichent, quant à eux, 1,284 milliard
d’euros pour la consommation professionnelle (dont 901 millions
d’euros pour les grossistes, versus 98 millions d’euros pour les dé-
taillants et 125 millions d’euros pour les distributeurs internet) et
3,544 milliards d’euros pour la consommation des ménages (dont
3,129 milliards pour les détaillants, versus 275 millions pour les
distributeurs internet)*.
Pourtant, il semble que seuls 25 % des Français nourrissent un
intérêt pour les arts de la table (voir les résultats de l’étude Obsoco en
pages suivantes). Les 75 % restants seraient non investis sur le sujet.
Dont feraient d’ailleurs partie les journalistes traitant de ces sujets
avec une méconnaissance des produits, a déclaré l’ex-président de
la CAT Guy Bourgeois, lors d’une table ronde réunissant Denis
Courtiade (restaurant Alain Ducasse au Plaza Athénée) et Bruno de
Monte (école Ferrandi).
Ce à quoi la rédaction d’Offrir International
répond pour sa part par une amicale invitation à (re)lire ses précé-
dents numéros, qui ont abordé il y a plusieurs mois déjà certains des thèmes à l’ordre du jour du colloque, mais aussi d’autres dont
elle a pu penser qu’ils concernaient son lectorat et plus appropriés
à traiter dans un média.
Des consommateurs à sensibiliser et à conquérir
Alors pour « faire la différence » et « aller chercher le chiffre d’affaires de
demain » (la baseline du colloque 2017), quels leviers actionner ? Le
défi est majeur, y compris pour l’action collective, et consiste à aller
conquérir de nouveaux consommateurs, peu sensibles semble-t-il à
l’art qui nous concerne. En témoigne par exemple le recul (- 2 %
en 2016) du secteur du linge de table aussi bien sur les secteurs
professionnels que grand public.
Alain Petitjean, directeur associé de Sémaphores (conseil aux acteurs
publics) et intervenant au colloque, a évoqué pour sa part « l’acceptation
sincère des nouveaux comportements d’achat, synonymes de nouveaux
territoires et de légitimité, et le ré-enchantement de l’expérience d’achat
qui deviendrait expérience d’échange, pour une relation client impliquante
et passionnée ». Soit un acte d’achat co-construit par le client et le
vendeur. Et de souligner que le rôle d’internet et des technologies
digitales était second, « l’essentiel reposant dans les attentes sous-jacentes
qu’ils permettent d’exprimer ».
Le m-commerce et le e-commerce sont certes en hausse, ainsi que
l’a expliqué Olivier Badot, spécialiste du commerce et de la distribution
intervenant au colloque. « Mais les points de vente reprennent
de la vigueur », a-t-il poursuivi, prédisant un plafond de verre pour le commerce digital. « Ce n’est pas tant la proximité qui a un avenir mais
la viscosité, à savoir l’implantation sur les flux naturels et organisationnels
du consommateur. Des tiers-lieux regroupant les motifs de déplacement,
qui sont des espaces multifonctionnels inscrits dans du patrimoine local. »
Un appel au regroupement
Du point de vue de l’action collective, les pistes sont de plusieurs
ordres : merchandising, omnicanal, service sur le point de vente,
export (vers la Chine notamment), a énuméré Thierry Villotte au
terme du colloque en insistant sur le pan communication des actions
entreprises. « Le CHR est un driver, a analysé le président de la
CAT, mais au niveau du grand public, la croissance est préemptée par de
nouveaux acteurs, dont Internet ou encore des marques telles que Cyrillus,
au détriment des industriels. Le gâteau est partagé par des acteurs de
plus en plus nombreux.» Avec une question de fond consistant à faire
grossir celui-ci.
Pour cela, un des axes évoqués par le président de la CAT est « l’innovation
produits, qui est l’ADN de nos marques », avec un appel aux
syndicats de fabricants à s’investir davantage dans les nouveaux process,
matériaux et technologies et à se regrouper. Thierry Villotte a de
plus renouvelé son souhait de voir les acteurs du culinaire rattachés
à la taxe HBJOAT et proposé de modifier le nom de la CAT en
Confédération de la cuisine et de l’art de la table.
« L’art de la table relève aussi bien de la solderie que du luxe, a par ailleurs
martelé Thierry Villotte. Or, contrairement à la joaillerie et la mode, le
luxe ne peut pas jouer son rôle de locomotive sur l’ensemble de notre marché.
D’où la notion de #tabling, qui évoque quelque chose de précieux, mais
aussi le savoir recevoir, une façon de prendre soin des autres. » Une idée
également portée par la blogueuse Nessa Buonomo, intervenante au
colloque, qui a pointé l’importance d’Instagram pour les secteurs
relatifs à l’art de recevoir.
Favoriser l’émergence des détaillants sur internet
Le concept #tabling, c’est justement le regroupement de l’ensemble
des activités et contenus liés aux arts de la table, à l’instar de ce que
le fooding est à la gastronomie. Sa mise en œuvre digitale a pour cible
principale, les femmes actives de 35 à 49 ans et les “digital mums”.
Max Maarek, directeur du planning stratégique chez Brainsonic,
agence spécialisée dans la stratégie et la production de contenus sur
les réseaux sociaux qui accompagne la CAT, a indiqué que les actions
menées en 2016 seraient poursuivies en 2018, avec également une refonte
ergonomique du site www.osezlartdelatable.fr et une réflexion
sur une #tabling week, envisagée comme un festival en partenariat
avec des acteurs du CHR et médiatiques. Concernant les actions
terrains, l’opération Videz vos placards sera renouvelée du 16 mars
au 7 avril prochains en partenariat avec Emmaüs.
Enfin, le chantier de l’échange de données informatisées se poursuit
quant à lui (voir Offrir International n° 461 en pages 10 à 14), la
phase test intervenant en principe au second semestre 2018, pour
un déploiement progressif en 2019.
« Nous avons du mal à motiver les détaillants dans l’action collective, a
reconnu le président de la CAT en guise de conclusion. Mais nous
ne leur amenons pas de service. C’est aussi un axe sur lequel il convient
de réfléchir. »