Dossier

Coutellerie : Merchandising de rigueur

05 mars 2024

Le couteau a changé de statut. De simple objet utilitaire, il est devenu beau, se veut davantage présentable… Alors, pour bien le vendre, un bon assortiment doit être bien mis en valeur, implanté et, luxe suprême… essayable !

Le couteau est toujours présent dans nos quotidiens, mais son statut a changé. C’est ce que constate Laurent Fleurot, responsable marketing de H. Beligné & fils pour Victorinox : « Des marques sont en train de le “déringardiser”. Nous nous rapprochons de l’univers de la mode ou de la lunetterie. Cela valorise le produit qui est mis en scène. Aujourd’hui, l’objectif est d’en mettre “plein la vue”, avec des beaux couteaux. En 15 ans, ce produit est passé de seulement utilitaire à bel objet. » Son merchandising évolue en conséquence : « La preuve que le couteau, de poche ou de cuisine, est déringardisé, c’est la mise en avant des marques pour les boutiques », avance le responsable marketing. 

Pour sa part, Laurent Fleurot prône un merchandising par marque, par gamme ou catégorie : « Victorinox a des mobiliers qui le permettent, avec des couteaux multifonctions d’un côté et ceux de cuisine de l’autre. Le rangement est réalisé avec rigueur. C’est plus percutant et plus vendeur. » Les corners permettent aussi à un fabricant connu pour le couteau de cuisine de montrer qu’il propose aussi des couteaux de poche et inversement. Pour Laurent Fleurot, il est essentiel de créer un parcours d’achat lisible.

L’ESSAYER POUR L’ADOPTER 

« En coutellerie, il convient de trouver un beau mobilier. Victorinox a des présentoirs magnifiques, avec du bois massif, qui permettent de réaliser une belle vitrine. La coutellerie a beaucoup à gagner à être bien présentée », souligne Laurent Fleurot, responsable marketing chez H. Beligné & fils pour Victorinox. Chez Victorinox, une équipe dédiée à ce service (décorateurs, designers, architectes d’intérieur, etc.) en Europe travaille au merchandising. 

Parmi l’offre de couteaux, comment aider le client à choisir ? « Chez Zwilling, nous partons du principe qu’un couteau doit être pris en main, car nous avons tous des morphologies différentes », partage Nathalie Chabert, directrice marketing et communication de Zwilling Staub France. En effet, le client doit voir s’il est à l’aise avec le poids, la forme du manche, etc. « Ce que nous préconisons en merchandising point de vente est d’avoir un espace dédié à l’essai, avec à disposition une planche et quelques légumes durs, tels que la carotte ou la pomme de terre, pour que le client se rende compte de la manière dont il appréhende le couteau, en fonction de son habitude de découpe », explique Nathalie Chabert. Au-delà de la mise à disposition de dépliants et de brochures, Kyocera propose des tables sur lesquelles les clients peuvent essayer ses couteaux en céramique et une machine à cintrer pour montrer la flexibilité de la céramique. « Nous essayons de toucher toutes les personnes intéressées par l’achat de couteaux en céramique de haute qualité, note Oliver Pinnow, responsable des ventes. Chaque cuisine a besoin d’un couteau en céramique et il constitue un complément indispensable aux couteaux en acier. » Le message de la marque : les couteaux en céramique Kyocera sont plus tranchants et le restent plus longtemps que les couteaux en acier, ils sont faciles à nettoyer et légers, et ne contiennent pas de métal. Ils sont donc parfaits pour les personnes qui souhaitent cuisiner avec peu d’effort et de manière saine.

UN BEAU CONTENANT 

Au-delà du produit, Benoit Bérot, directeur marketing de Jean Dubost, rappelle que son contenant constitue un élément clef pour l’aide à la vente : « Nous travaillons notre offre en termes de mobiliers facilitant à la fois la présentation des collections en magasin et le choix des consommateurs. » Ceux-ci doivent rehausser les gammes, la marque et ses valeurs afin de renforcer l’acte d’achat du consommateur final. Pour aider les distributeurs à créer une histoire dans leur magasin, le coutelier leur propose la mise en place de shop-in-shops dédiés pouvant accueillir une collection complète de la marque Jean Dubost, ce qui permet de valoriser sa présence et sa “décodabilité” au milieu de l’offre large et vaste dans les points de vente.

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FAROL : DES CHUTES DE VOILES POUR PACKAGING

Farol, labellisée Entreprise du patrimoine vivant depuis 2013, recycle depuis fin 2023 les chutes de Voilerie Klein également labellisée EPV, pour créer ses packagings. La coutellerie rochelaise a en effet choisi de ne plus utiliser le carton pour ses emballages. Au terme de plusieurs mois de recherches de solutions, c’est auprès de Voilerie Klein que Farol a trouvé le partenaire idéal, ancré comme elle dans le milieu marin et au savoir-faire reconnu. « Cette collaboration permet de répondre à différentes problématiques, expliquent Théo Grellier, gérant de Farol, et Elodie Stephan, responsable commerciale de la marque. Pour l’une il s’agit de trouver une solution d’emballage écologique. Pour l’autre de valoriser les chutes liées à la découpe des toiles marines. » 

Ces nouveaux packagings et la mise au point des patrons qui s’adaptent à chaque couteau sont le fruit d’un travail mené par Théo Grellier, Valdéric Scheid, gérant de Voilerie Klein, et Audrey Duboy, maroquinière compagnon du devoir qui travaille chez Farol. « Cela nous permet de conserver l’ADN de Farol qui est d’internaliser toutes les opérations. Aujourd’hui, dans l’atelier nous fabriquons nos lames, nos manches et nos étuis, le packaging était l’étape suivante. » Pour rappel, Farol, est une manufacture rochelaise de coutellerie marine depuis 1996, installée historiquement à l’Encan, ancienne criée du port, et depuis 13 ans dans un second atelier situé dans le quartier de la Pallice. Cette entreprise artisanale fabrique des couteaux et des articles de maroquinerie. Entre 5 000 et 6 000 couteaux sortent chaque année de ses ateliers.

« Il est intéressant de disposer d’une descente murale pour présenter les couteaux dans leur intégralité, leurs déclinaisons de lames, etc. » 

Nathalie Chabert, directrice marketing et communication, Zwilling Staub France.

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UN AUTHENTIQUE ÉCRIN  

Laguiole en Aubrac met pour sa part en avant un modèle de coffret bois développé avec une société française. « L’idée est que le packaging soit utilisé facilement, avec un couvercle amovible, commente Clémence Bax, responsable communication de la marque. Le produit est visible et identifiable. Nous avons aussi placé un logo à l’intérieur. » Du point de vue de l’expérience client, la société a développé un écrin qui se veut en concordance avec son identité. « Le bois vise à retranscrire l’authenticité de la marque. Une mousse à l’intérieur du coffret est à la fois une aide à la présentation et remplit un rôle de protection du produit », décrypte Clémence Bax. Laguiole en Aubrac dispose d’un réseau de 12 boutiques en France qui l’aide à observer ce qui peut être développé et ce qui fonctionne. « Nous prêtons attention, par exemple, à ce que la lumière vienne refléter dans la lame. Autre élément : nous avons choisi des mousses quasi noires pour faire ressortir l’acier des lames. Le bois du coffret, aussi, est un bon choix aujourd’hui, car c’est une matière durable », commente Clémence Bax.
A Ambiente, Goyon-Chazeau a présenté deux nouvelles solutions merchandising : un présentoir bleu 12 couteaux Grand Tradi qui permet de mixer les manches (olivier, ébène, ébène bicolore du Mozambique, noyer) à l’instar du présentoir 30 couteaux P’tit Tradi généralement positionné en caisse par les revendeurs pour générer des ventes additionnelles en fin de parcours client ; une boîte duo P’tit + Grand Tradi rouge et bleue rappelant chacun des packagings propres à chaque couteau. Deux solutions permettant d’abaisser le coût unitaire du couteau, avec un prix public de 90 € la boite duo P’tit + Grand Tradi (versus 38 € le P’tit Tradi et 60 € le Grand Tradi).
Chez Deejo, le merchandising est un sujet clé depuis la première heure. « Et pour cause, souligne Luc Foin, créateur de Deejo avec Stéphane Lebeau, ayant pour objectif dès l’origine du projet de démocratiser le couteau de poche et donc de le vendre dans des réseaux de distribution qui n’en vendaient alors pas ou peu, il convenait d’imaginer une solution de présentation efficace et facile à mettre en œuvre, parfaitement adaptée à tout type de magasins. » La marque a imaginé un système de boîtes aimantées au couvercle transparent qui, selon Luc Foin, a largement contribuées au succès commercial de Deejo. Cet écrin met en évidence la valeur des produits et permet aux détaillants de les mettre en scène facilement en magasin : « Aimantées sur les côtés et au dos, nos boîtes s’assemblent telles des briques Lego® pour des compositions originales et adaptées à chaque surface de vente. En quelque sorte, nous vendons le “meuble vitrine” qui permet d’exposer nos couteaux en même temps que le produit. » Deejo a de plus développé une gamme complète de présentoirs rotatifs (de comptoirs et de sols) adaptés au format de cette boîte, décuplant ainsi son efficacité commerciale auprès de son réseau de revendeurs.
Depuis 2022, la coutellerie Claude Dozorme mène un travail de fond sur les packagings de ses produits. A commencer par les Liner-lock qui bénéficient désormais d’une présentation valorisant leur fabrication française. « Ils fêtent cette année leurs 22 ans et seront proposés dans des boites bleu/blanc/ rouge pour l’ensemble de la gamme, se réjouit Didier Perret, CEO de Claude Dozorme. Et des présentoirs sont à l’étude pour remettre sur le devant des boutiques ces produits précurseurs des couteaux compacts qui sont aujourd’hui des best-sellers. » L’emballage étant aussi l’expression du positionnement d’un produit, la gamme de couteaux Haute Cuisine a vu son packaging en carton ondulé évoluer en une boîte avec couvercle, proposée en un combiné de 3 couleurs : écru, marron et orange. « Cette déclinaison attire l’œil du consommateur et place le produit à son rang premium, poursuit Claude Dozorme. La gamme des sabres à champagne bénéficiera également de nouveaux packagings dans les prochaines semaines à venir pour porter l’image de marque toujours plus haut dans un domaine où le raffinement est roi ! Nous n’oublions cependant pas les traditionnels coffrets en hêtre ou en chêne qui, loin des modes passagères, font mieux que se défendre et ce depuis des décennies. Nous faisons fabriquer localement ces boîtes, coffrets et présentoirs. »
Avec ses écrins, Laguiole en Aubrac a souhaité un packaging qui suscite l’envie, en concordance avec l’image de la marque, et afin que les vitrines soient optimisées. Dans une vitrine classique, il est possible de présenter le coffret debout sans couvercle. Dans une vitrine basse, le couvercle peut être placé en dessous du coffret, pour jouer sur les hauteurs. « Le coffret bois est quelque chose qui est gardé. C’est un packaging durable, ce qui est important et apprécié aujourd’hui », ajoute Clémence Bax, responsable communication de Laguiole en Aubrac.


UNE COMMUNICATION PLUS LUDIQUE 

Si Arcos met toujours en avant le haut de gamme et la performance de ses couteaux, la marque espagnole a lancé une communication plus ludique, proche du client, avec des petits personnages. « Le côté fun répond au besoin de visibilité du produit, explique Sarah Mussati, chargée de communication et marketing chez Arcos. La spécificité de la coutellerie est aussi qu’un couteau est tranchant, donc potentiellement dangereux. Il nous faut le rendre plus sympathique. » La marque travaille aussi l’attractivité du packaging, avec le carton recyclé et recyclable. « Le packaging doit montrer quel type de couteau est à l’intérieur, indique Frédéric Moyon, directeur commercial d’Arcos. Tous les couteliers sont sur la même ligne, à savoir en train de bannir le plastique. « Nous nous orientons vers le 100 % recyclable et recyclé, insiste Frédéric Moyon. Nous allons adapter toutes nos gammes. »

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« Le merchandising est l’équivalent du design d’un site Internet. Pour acheter, le client doit comprendre. »

Laurent Fleurot, responsable marketing, H. Beligné & fils. 

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DES PRÉSENTOIRS À SUCCÈS 

« Pour la partie technique de coutellerie, associer les usages et les fonctions aux produits facilite la compréhension des gammes. Un client renseigné rapidement est souvent synonyme de vente transformée, fait valoir Benoit Bérot, directeur marketing de Jean Dubost. Le concept “à chaque couteau son usage” avec des pictogrammes dédiés, permettant au consommateur de comprendre en un clin d’œil l’usage de tel ou tel modèle de lame, est un concept pédagogique déposé par notre maison. »
Au-delà de la mise à disposition de dépliants et de brochures, Kyocera propose des tables sur lesquelles les clients peuvent essayer ses couteaux en céramique et une machine à cintrer pour montrer la flexibilité de la céramique. « Nous essayons de toucher toutes les personnes intéressées par l’achat de couteaux en céramique de haute qualité, note Oliver Pinnow, responsable des ventes chez Kyocera. Chaque cuisine a besoin d’un couteau en céramique et il constitue un complément indispensable aux couteaux en acier.


Le P’tit Tradi, couteau d’office fait main 100 % français, est un modèle phare de Goyon Chazeau. Le coutelier propose un présentoir 30 pièces, qui constitue une solution merchandising pour les boutiques qui le placent sur le comptoir. « Souvent, les magasins qui travaillent bien avec nos produits les achètent dans ce présentoir, observe Magali Soucille, présidente de Goyon-Chazeau. La couleur attire l’œil et le côté French touch fonctionne bien. Cela génère une vente additionnelle. » Ce dispositif fonctionne tellement bien que la société a souhaité aller plus loin pour Ambiente : « Nous sortons le présentoir en 12 couteaux “Grand Tradi” bleu. Il y aura également une offre associée, le présentoir duo rouge et bleu, pour proposer d’acheter les deux formats ensemble. » 

UNE SEGMENTATION CLARIFIÉE


Nogent***, marque centenaire, propose plutôt de la petite coutellerie, avec la base line “j’épluche, je coupe, je déguste” et des produits souvent placés dans des bacs en vrac. « L’usine est 100 % made in France sur la coutellerie, souligne Pascal Provost, directeur commercial France/ export de Nogent***. Nous avons la chance d’avoir des aides à la vente, car en fin d’année, il y a beau y avoir deux vendeurs dans une boutique, s’il y a du monde, l’offre doit être lisible pour que le client achète. Dans un premier temps, j’ai voulu apporter une carte pour mettre en évidence le bleu/blanc/rouge, mais sur une carte, il n’est pas possible de toucher la lame. Nous avons donc travaillé en apportant autre chose pour être vu : la couleur. L’objectif est de réveiller le rayon vrac. Pour le centenaire de Nogent***, nous avons surtout clarifié la segmentation, avec des couleurs différentes. La tendance est de sortir du merisier, pour aller vers des bois plus clairs »

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« LE COUTEAU EST DEVENU UN OBJET DE VALEUR »

« Chez Forge de Laguiole le merchandising se doit d’être en accord avec les codes de la marque mais également répondre à de nouvelles habitudes de consommation, estime Charlotte Raynal, responsable marketing chez Forge de Laguiole. La coutellerie traditionnelle se modernise, nous adoptons une présentation épurée et haut de gamme de nos produits, car le couteau initialement outil du quotidien est devenu un objet de valeur. C’est ce que nous essayons de représenter en liant tradition et modernité au sein de nos points de ventes. Nous avons à cœur d’adopter une cohésion entre nos produits et leurs présentations en magasin à l’instar de celle adoptée dans notre nouvelle boutique à Rodez où les produits sont disposés sur une table design signée Philippe Starck où l’on peut également retrouver des pièces brutes liées à la fabrication des couteaux. Un kit déco est d’ailleurs proposé à l’ensemble de nos clients pour étoffer leurs vitrines, cela permet de montrer tout le travail nécessaire à la fabrication d’un seul couteau. Au-delà de la présentation matérielle des produits nous attachons également beaucoup d’importance dans l’accompagnement du choix du couteau. Dans cette même boutique par exemple, nous consacrons toute une partie pour les couteaux sur mesure où le client peut s’inspirer de modèles uniques présentés, accompagnés des conseils du vendeur pour créer de A à Z son couteau idéal. »

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Fort d’un parcours réalisé en partie dans la grande distribution alimentaire, Pascal Provost connait ses basiques  « hauteur des mains, hauteur des yeux » et rappelle que « le merchandising, c’est d’abord un bon emplacement et une étiquette avec un prix ». La coutellerie est un univers générateur de marge, à condition donc de lui consacrer une jolie place, en faisant la part belle à la diversité : « J’apprécie quand plusieurs marques sont présentées côte-à-côte. Rien de plus triste qu’une marque unique, ou un seul type de couteau ! », estime Nathalie Chabert. Si le couteau est peu gourmand en mètre linéaire, il importe cependant que les produits soient bien ordonnés. « Nos partenaires revendeurs font parfois appel à nous pour réaménager le magasin, confie Laurent Fleurot. Refaire une vitrine, avec une thématique ski par exemple, se révèle souvent efficace. Le résultat, c’est 20 à 25 % de vente en plus sur le rayon. » Les boutiques en propre de sa société se révèlent être un bon observatoire : « Nous voyons par exemple que des jeunes viennent acheter des couteaux, et, pas forcément les produits que nous aurions imaginés ». Et à clientèle diversifiée, offre renouvelée…

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