La responsabilité sociétale des entreprises se révèle être un phénomène de fond qui présage un chang
D’ores et déjà impactée par deux années de restrictions liées à la pandémie, la fréquentation des magasins physiques décroche un peu plus avec l’inflation et les pénuries d’essence. Pour pallier ce phénomène, le secteur des arts de la table peut jouer la carte de l’animation commerciale.
Restrictions, inflations, ces aléas sont le lot de presque tous les commerçants, mais ceux qui évoluent dans le secteur des arts de la table ont la possibilité – compte tenu de la nature des produits qu’ils distribuent – de redynamiser leur boutique, capter l’attention et générer du trafic grâce à l’animation commerciale. Si certains commerçants déploient une vision stratégique et opérationnelle annuelle, d’autres dégainent les démonstrations, les jeux-concours ou les bons de réduction de manière opportune, en période creuse ou pour faire face à une conjoncture défavorable.
Dans tous les cas, ils sont unanimes : il
faut prendre le risque d’investir dans l’animation commerciale. Si ces
opérations marketing ne sont pas, à coup sûr, un levier pour relancer les ventes, déstocker et augmenter son
chiffre d’affaires, elles n’en demeurent pas moins un excellent prétexte
pour répondre à des objectifs variés : démontrer
le dynamisme d’une marque ou d’une boutique, lancer un produit, créer du
contenu pour ses réseaux sociaux ou obtenir de la data. En outre, elles
répondent à un besoin criant des consommateurs depuis la fermeture forcée des
commerces qu’aucun site e-commerce ne saura satisfaire : l’expérience client,
expression quasi magique synonyme de succès marketing et de différenciation. « Les
statistiques le montrent : 90% des achats se font, aujourd’hui encore, en
point de vente physique. En revanche, si les consommateurs se contentaient
auparavant d’y faire leurs courses, depuis la crise sanitaire et la réouverture
des magasins, ils veulent une plus-value par rapport à une session classique de
shopping en ligne. Ils ont tout à portée de clic alors ils veulent vivre un
moment particulier. Ils attendent de l’expérientiel et cela passe par
l’animation commerciale », explique Sandrine Jean, directrice
générale de Shop! France (ex-Popai France),
l’agence internationale qui fédère les acteurs du marketing point de vente.
En effet, à l’heure du digital et de l’omnicanal, il est encore plus urgent
de réintroduire du sens et de la proximité dans la relation avec le
consommateur en magasin.
La démonstration culinaire, un indémodable aux objectifs variés
Dans le secteur des arts de la table, pour accroitre l’attractivité d’une boutique et établir le lien avec le prospect, l’organisation d’une démonstration culinaire apparaît comme une évidence. Mais pour garantir son succès, il est nécessaire de procéder par étapes.
Pour Céline Beckrich,
déléguée générale de la Confédération des arts de la table (CAT) et
ex-animatrice commerciale, la préparation d’une démonstration culinaire peut être faite de manière spontanée et ou être organisée comme un
événement. Pour en tirer le maximum de bénéfice,
elle se découpe en trois temps : le lancement, la démonstration et l’entretien
de la communauté entre deux éditions. « Dans un
premier temps, et pour s’assurer de la venue d’un maximum d’acheteurs
potentiels, il est primordial d’informer sa base client par le biais d’une
newsletter par exemple ou de communiquer sur les réseaux sociaux à travers des
publications ou la création d’événements, ce qui permet d’augmenter le trafic
le jour de la démonstration. Cette communication a le mérite de montrer le
dynamisme du point de vente et de valoriser son image. D’ailleurs un nouveau
fil d’actualité émerge pour aider les commerces détenteurs de fiches Google
Profil anciennement Google my Business, à promouvoir ce type d’actualité : les
posts “événements”. Ils permettent de partager les événements aux clients
et de les inviter à s’inscrire via un bouton dédié ce qui, outre donner au
commerçant une idée approximative du nombre de participants, rapporte de la
data. »
Lionel Debus
a un avis différent. Le directeur d’Epicuria, société du groupe Hefed qui gère
l’enseigne TOC, est un adepte de l’animation culinaire, à tel point que sur les
20 boutiques de l’enseigne, près de 80 % sont dotées d’une cuisine
équipée. Qu’il s’agisse de testings ou de simples démonstrations, il n’en
organise pas moins d’une par mois ; un planning annuel est élaboré pour surfer
sur chaque opportunité, que celle-ci soit liée à un marronnier, une actualité
ou une tendance de société. « Chez TOC, nous privilégions l’effet de
surprise, cela fait partie intégrante de l’expérience client. De plus, si la
communication est mal proportionnée, l’effet peut se révéler contreprodutif.
Selon leur taille, les boutiques ne pourront peut-être pas absorber le flux de
visiteurs. Si ces derniers sont agglutinés, ils auront sans doute moins de
visibilité sur le tour de main réalisé et les interactions avec nos
collaborateurs seront plus compliquées », développe Lionel Debus.
Une tendance venue d’ailleurs : le liveshopping
Le groupe Seb a instauré une stratégie multimarque lui permettant de s’inscrire durablement dans des marchés mondiaux et locaux. Cette présence à l’international représente un avantage considérable pour benchmarker et repérer les tendances émergentes en matière d’animation commerciale à l’instar du liveshopping. Ces vidéos en direct dédiées à la présentation et vente de produits ont connu un succès grandissant en Asie, notamment en Chine. Le géant des réseaux sociaux TikTok déploie d’ailleurs actuellement son offre de liveshopping aux quatre coins du monde. « Il est évident que le groupe Seb se nourrit de ces nouvelles pratiques qui voient généralement le jour en Asie et tendent à capter les consommateurs au moment où ils ont le plus besoin d’information. Ceux-ci se renseignent dans un premier temps sur le web avant de se rendre en point de vente, aussi nous observons ce phénomène de liveshopping avec une attention particulière et expérimentons d’ores et déjà ce type d’animation commerciale avec certains de nos distributeurs pour des produits à forte valeur ajoutée comme le i-Companion Touch XL Moulinex ou la machine à café Krups par exemple mais également pour des poêles ou du petit électroménager (batteurs, mixeurs etc.) » , dévoile Marion Barrere (groupe Seb France).
Des collaborateurs formés, la clé du succès
Pour le dirigeant d’Epicuria, avant même les produits, les collaborateurs des boutiques TOC sont le cheval de bataille des animations commerciales, qui plus est, des démonstrations culinaires dont le succès dépend, en partie, de leur faculté à mettre en lumière une référence.
« Nombreux sont nos
collaborateurs à avoir eu une expérience en restauration avant de travailler
chez TOC. Ils sont plus à même de réaliser des gestes techniques et de
comprendre les caractéristiques des produits dont ils font la démonstration.
Les clients le constatent tout de suite et demandent conseils. C’est positif
pour l’image du produit mis en scène, celle du point de vente mais aussi pour
la marque employeur parce que l’expertise des collaborateurs est valorisée.
»
Mickaël Zarb,
directeur commercial et du développement de Bracconi, partage ce constat et
confirme que ces démonstrations culinaires fidélisent le client : « Des
liens se créent pendant ces démonstrations. Alors, pour que l’animation
commerciale soit toujours un véritable succès, j’envoie mes conseillers – comme
j’aime à les appeler – à chaque atelier proposé par les marques commercialisées
dans nos points de vente. Il m’arrive même de les former moi-même sur de
nouveaux produits. Plus ils sont formés sur un large panel d’articles, plus ils
peuvent répondre aux objections des acheteurs potentiels. »
Si Mickaël Zarb a choisi d’internaliser ces opérations, d’autres, tout aussi conscients que le succès d’une telle opération relève avant tout de la personne qui l’anime, optent pour un prestataire extérieur. Jacques Sztajnert, agent France de Silikomart et Marcato, a missionné une ambassadrice multimarque : cette animatrice commerciale professionnelle freelance se déplace dans les magasins distributeurs des deux marques italiennes pour réaliser des démonstrations. Pour Jacques Sztajnert, ce modèle comporte trois avantages. Avant tout, il garantit au magasin d’avoir, derrière chaque animation, une personne investie, passionnée et capable de transmettre le bon message grâce à un sens aiguisé de la communication.
Par ailleurs, ce fonctionnement permet de mesurer l’impact de ces animations sur les ventes. « Prenons l’exemple de la machine à pâtes fraîches Marcato. Une boutique qui organise une démonstration pour montrer que 15 minutes suffisent à réaliser des lasagnes ou des linguines verra son chiffre d’affaires multiplié, au minimum, par trois par rapport à celle qui n’aura rien mis en place », souligne Jacques Sztajnert. Enfin, la sous-traitance de l’animation donne une flexibilité au gérant de la boutique.
« Si vous
trouvez la bonne personne qui, en plus de diffuser les informations
essentielles, a la bonne gestuelle et sait faire de la mise en scène,
l’opération sera alors un succès 9 fois sur 10. Fort de sa première expérience,
le gérant peut calculer le ROI et prévoir un budget dédié à ses animations dans
sa stratégie d’investissement. Généralement, ils sont tellement satisfaits des
ventes qu’ils n’arrivent plus à se passer de l’expertise de cette personne.
»
Pour diminuer
les coûts et maximiser la rentabilité d’une démonstration culinaire, Sandrine
Jean (Shop! France) préconise les partenariats
avec des marques alimentaires : « Les arts de la table collaborent
régulièrement – et de plus en plus – avec des marques de grande consommation
pour la réalisation de leurs démonstrations. D’une part, parce que les arts de
la table sont des produits très impliquants, utilisés au quotidien et qu’il
importe de rassurer le consommateur en lui expliquant qu’on lui procure une
expérience différente avec des marques alimentaires qu’il a pour habitude
d’utiliser. D’autre part, parce qu’en échange de la publicité, celles-ci sont
tout à fait disposées à contribuer, pour partie, au financement de la
démonstration. »
Valeur ajoutée, technicité et créativité
Côté produits, tous ne se prêtent pas à l’exercice de la démonstration. Pour d’autres c’est en revanche un passage obligé. Et pour cause, il semblerait qu’une démonstration motivée permette à 65 % des prospects de retenir un argumentaire de vente durant 3 jours contre seulement 10 % lorsqu’un conseiller se contente d’une explication orale.
« Les produits de grande consommation n’ont pas besoin de
démonstration mais pour des articles tels que ceux de la coutellerie ou de la
cuisson, c’est indispensable », constate Sandrine Jean. En effet, deux types de produits semblent être
concernés par les démonstrations. En tête, les produits techniques à forte
valeur ajoutée comme ceux issus des industries précédemment citées.
Viennent ensuite les produits qui incitent à une certaine créativité. Lionel
Debus (TOC) n’hésite pas à démontrer l’efficacité et la robustesse des couteaux
Goyon-Chazeau. « Mes équipes gardent toujours un ou deux fruits frais
dans les réfrigérateurs de nos cuisines équipées, au cas où un client serait
dubitatif quant à la qualité de ces couteaux conçus artisanalement dans
l’atelier auvergnat Goyon-Chazeau. Certains modèles coûtent jusqu’à 200 €. C’est
donc du matériel d’exception mais à ce prix, le consommateur qui a dans un
premier temps, apprécié son manche en bois de cade, a besoin d’être convaincu
par sa lame en acier forgé, trempé haute qualité Z50CD15. La démonstration
donne aux vendeurs la possibilité de légitimer le prix. » Marion
Barrere, chargée de l’animation des ventes chez Groupe Seb Francen le rejoint :
« Le consommateur qui ambitionne d’investir dans un robot cuiseur a besoin
d’être rassuré par une démonstration. Il veut qu’on lui prouve la facilité
d’utilisation et l’ampleur de ses fonctionnalités. »
Pour Florian
Lecourtois, business developer France pour Ideco Paris, parmi la
quinzaine de marques représentées par l’agence, Gefu répond parfaitement aux
besoins d’une démonstration culinaire réussie : « Cette marque allemande propose, entre autres, des ustensiles de
découpe qui permettent d’exprimer une grande créativité. Le taille-légumes
Spirelli, par exemple, crée en peu de temps des juliennes de légumes sans fin
avec des carottes, des radis, des concombres… C’est ludique, visuel, coloré.
Pour peu qu’il y ait des enfants à proximité du stand, c’est le succès
garanti. »
Gamification et nouvelles technologies
Si nombre de
commerçants voient l’animation commerciale comme le dernier rempart du retail
face à l’essor du e-commerce, d’autres n’hésitent pas à se servir du net et des
nouvelles technologies pour penser l’expérience in-store et inciter les
consommateurs à venir en point de vente.
La CAT organise une animation d’envergure nationale
tous les deux ans à laquelle l’ensemble des distributeurs et détaillants
affiliés peuvent participer. En mai, avec le soutien de Francéclat se déroulait
Tables en folie. L’opération, sous la forme d’une loterie avec obligation
d’achat, permettait à 1 client sur 10 de partir sans payer ses achats réalisés
en boutique. Ce format était une première pour la CAT.
La gamification propose des parcours clients innovants
et personnalisés qui retiennent l’attention. Elle participe à la hausse des
taux d’engagement, de conversion et de transformation, ainsi qu’à la
fidélisation de l’audience. Enfin, ce système de gamification permet
généralement de récolter de la data, indispensable pour faire monter en
puissance ses actions commerciales. « Il est
aujourd’hui nécessaire de se démarquer et surprendre la clientèle. Pour cela,
les nouvelles technologies permettent à la fois de proposer des solutions et
des idées innovantes pour développer une animation impactante et du
divertissement en point de vente et à la fois renforcer le lien avec le client
ou le prospect pour permettre au vendeur d’être au plus proche du client et
retrouver son rôle d’expert en boutique. Au-delà du jeu, les nouvelles
technologies offrent des possibilités infinies en termes d’animation. Dans le
domaine des arts de la table, il pourrait donner lieu à des expériences
inspirantes et disruptives en permettant d’essayer différentes combinaisons de
dressage de table par exemple. En verrerie, nous pourrions imaginer l’usage
d’une technologie telle que l’haptique pour permettre au client de ressentir la
finesse d’une coupe à champagne ou les gravures qui la décorent. Ce type
d’animation sort de l’ordinaire, ravit les collaborateurs et les consommateurs. »
Il y a 3 ans, pour animer les ventes de son cuiseur vapeur Steam Up
Moulinex, le groupe Seb s’était tourné vers le casque de réalité virtuelle :
« Le produit était innovant, sa technologie brevetée diffuse la vapeur
vers le bas. Aussi, nous avions imaginé une animation durant laquelle
l’utilisateur enfilait un casque pour être immergé dans l’utilisation du
produit. Mais sur le moment, l’opération n’a pas eu l’effet escompté. Nous
n’avons aucun doute sur l’efficacité de ces nouvelles technologies en animation
commerciale mais elles ont quelque chose de très générationnel qui n’émouvait
notre cible il y a 3 ans », analyse Marion
Barrere (Groupe Seb). Depuis, la pandémie étant passée par là, la génération Y
a enfilé son tablier et il y a fort à parier que le succès de l’animation
serait au rendez-vous.
L’animation commerciale empreinte d’écoresponsabilité
Exit le
gaspillage alimentaire, les spots énergivores et les installations à usage
unique. Désormais qu’il s’agisse d’une démonstration culinaire ou d’une
nouvelle vitrine et quel que soit l’organisateur de l’animation, les impacts
environnementaux sont à intégrer de façon globale dans les critères de
décision. « Le retail responsable, aujourd’hui c’est le nerf de la
guerre ! estime Sandrine Jean (Shop! France). Cela oblige les
porteurs de projet à penser leur opération différemment. Prenons l’exemple de
l’indémodable démonstration culinaire élaborée pour mettre en avant les
caractéristiques techniques d’un plat en céramique. Le collaborateur devra
veiller à ce que les ingrédients qu’il utilise pour sa recette respectent la
saisonnalité. Et si plusieurs préparations ont vocation à être cuites, elles
devront être enfournées en même temps pour optimiser la cuisson, donc
l’énergie. Enfin, il est impensable que les plats ne soient pas intégralement
consommés. Ils peuvent être réservés pour une association. Tout doit être pensé dans une démarche d’économie
circulaire. Pour l’image de la marque et du magasin et pour ne pas entraver la
réflexion du client sur son potentiel achat, il est nécessaire de véhiculer ces
valeurs de bon sens. »
Le groupe Seb
s’est inscrit dans cette démarche. Après avoir
été pionnier de la réparabilité avec le lancement du label “produit 10 ans
réparable” en 2015 et la création de son label Ecodesign en 2021, il semblait
cohérent que ses animations commerciales soient également empreintes
d’écoresponsabilité. Pour structurer les espaces dédiés à celles de ses
marques, il dote les enseignes de distribution de stands écoconçus :
« Le plastique est banni de nos installations qui sont désormais en
matière recyclable et nos animateurs reçoivent des kits d’animation
réutilisables. Côté aliments, les quantités utilisées pour les démonstrations
sont considérablement revues à la baisse, et depuis peu le marc de café issu
des animations dédiées aux machines à café avec broyeur Krups est récupéré puis
utilisé en compost dans les villes qui disposent de sites de compostage »,
énumère Marion Barrere. Le numéro 1 mondial du petit équipement
domestique va jusqu’à mettre en place des animations commerciales dont
l’essence même est écoresponsable pour Tefal avec des opérations de recyclage
durant lesquelles les consommateurs ont la possibilité de ramener leurs poêles
et casseroles usagées en échange de bons d’achat.
Le tablescaping
Pour inciter les clients à franchir leurs portes, les points de vente peuvent s’appuyer sur une animation propre aux arts de la table : le tablescaping qui consiste à dresser des tables de façon artistique et décorative. Cette opération répond à plusieurs objectifs. Elle permet avant tout de rompre avec la monotonie en apportant aux boutiques une touche d’élégance et de féerie. « C’est une opération que l’on fait régulièrement, mais elle se prête particulièrement à la période des fêtes. De début novembre à fin décembre, nos animations sont rythmées en trois cycles. Le premier est dédié aux cadeaux de Noël, le deuxième à la préparation des repas de Noël, le dernier au réveillon de la Saint-Sylvestre. À chaque cycle, nous changeons la décoration des tables. Le dressage de la dernière semaine de décembre mettra davantage en lumière les verres à cocktails et les ustensiles nécessaires à leur préparation», détaille Lionel Debus. Bon prétexte pour sortir certaines références de leurs packagings, ce dispositif inspirationnel entraîne des achats d’impulsion et donne la possibilité au consommateur de contribuer à la communication du point de vente et des marques représentées dans ces mises en scène en les photographiant et en les partageant sur les réseaux sociaux. A l’heure où sont écrites ses lignes, le hashtag #tablescape référence près de 1,8 million de publications de tables dressées sur Instagram.