La responsabilité sociétale des entreprises se révèle être un phénomène de fond qui présage un chang
Dossier
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Cuisson : régler le merchandising pour guider l'expérience client
Outil clé pour développer les ventes et se distinguer de la concurrence, le merchandising est un précieux allié lorsqu’il s’agit de relayer la technicité des ustensiles de cuisson, à condition d’élaborer une stratégie cohérente qui aide le client à se projeter
L’ un des principaux enjeux du magasin est de rentabiliser l’espace de vente. Une stratégie gagnante pour atteindre cet objectif est l’optimisation du merchandising : celui-ci stimule en effet les ventes, attire l’attention des chalands grâce à son impact visuel, anime l’offre en rayon et favorise l’achat d’impulsion.
Les magasins
doivent aujourd’hui forcer le trait en matière d’inventivité au regard de
l’e-commerce qui met en avant des articles avec pas ou peu de mise en
scène et une communication orientée informations techniques et prix.
La particularité du merchandising lorsqu’il est question d’ustensiles de
cuisson réside dans deux principaux critères. « Ce sont des produits
très techniques et nous nous apercevons que les clients sont encore
nombreux à ne pas savoir comment saisir, cuisiner dans l’inox ou encore
mijoter… La cuisson est un champ complexe, le merchandising est donc
un outil qui aide à identifier le bon ustensile pour le bon usage », résume
Philippe Gelb, directeur général de Beka France. Pour y remédier, Beka
développe par exemple des leaflets A5 à destination du consommateur
pour l’accompagner dans ses premiers pas dans l’utilisation. Autre outil
qui se révèle un bon allié pédagogique : le QR code, avec lequel les
consommateurs sont largement familiarisés depuis la pandémie de covid-19. « La catégorie cuisson est hyper technique, il importe donc d’avoir
un ou des supports pour bien vendre et bien utiliser le produit, en plus de
fournir une présentation attractive », renchérit Valérie Bignon, dirigeante
du magasin Casseroles & Co à Saint-Julien-en-Genevois (Haute-Savoie).
Second facteur de complexité, la mise en
scène de ces ustensiles ne coule pas de
source. « La présentation des produits dédiés
à la cuisson en point de vente est statique
et sortie du contexte de l’utilisation, souligne
Nathalie Chabert, responsable marketing de
Zwilling France. Même la céramique culinaire,
malgré la belle palette de couleurs qu’elle arbore, n’échappe pas à cette règle : « Ce sont
des produits plats qui se posent à l’horizontale
sur la table : ce n’est donc pas l’idéal pour les
présenter en magasin, relève Annabelle Geffroy, chef de produit cuisson chez Peugeot
Saveurs. Nous avons donc conçu des présentoirs pour verticaliser nos plats pour qu’ils
soient vus de loin, dans leur intégralité et de
façon à mettre en avant leur empilabilité. »
LE MEILLEUR VENDEUR DU MAGASIN ?
Lionel Debus, directeur général de l’enseigne
TOC, est formel : un merchandising bien réglé
est une clé de succès, susceptible d’accroître
le chiffre d’affaires du magasin de 10 à 15 %.
« C’est un des meilleurs vendeurs du magasin : présent en vitrine, en caisse et en rayon,
il rapporte tout le temps et travaille de la première minute de l’ouverture du magasin à la dernière avant la fermeture,
voire la nuit si la vitrine est éclairée, résume Lionel Debus. Mais attention : si le merchandising est un étai, une composante du processus de
vente, ce sont la qualité du conseil et les compétences des vendeurs qui font la différence. » L’enseigne utilise
une variété de techniques : mettre en
avant les produits selon la saisonnalité,
utiliser des casseroliers qui permettent
une circulation fluide et de passer d’une
proposition à l’autre, et surtout soigner les zones chaudes (au niveau
des yeux du client) : « Les best of sont à placer à cet endroit et cela
doit être réglé comme du papier à musique. Pourquoi ? Parce que cela
a un impact direct sur le résultat du magasin », insiste Lionel Debus.
Le merchandising est donc à bâtir sur la base des résultats réalisés
par les produits, et non sur une habitude, un espace disponible, le fait
d’apprécier tel ou tel article, ou parce que celui-ci est placé à tel endroit
tous les ans.
LE PORTE-PAROLE DE LA TRAÇABILITÉ ET DE LA QUALITÉ
Certes c’est une lapalissade : les ustensiles de cuisson sont destinés à être en contact avec les aliments. Un paramètre qui a une incidence sur le merchandising à l’heure où les consommateurs sont de plus en plus attentifs aux conditions de production, aux matériaux utilisés et à leur santé, ainsi que l’explique Guy Gyselinck, directeur des ventes France pour The Cookware Company : « La qualité et la traçabilité à chaque étape de la production sont mises en avant, de la fabrication jusqu’au consommateur : labels, PLV indiquant les garanties, qualité des produits, etc. L’accent sur le merchandising est d’autant plus important que notre offre – les ustensiles revêtus en céramique sans PFAS, est spécifique et encore relativement méconnue en France. » Dans le segment des ustensiles de cuisson, le produit ne se suffit en effet pas à lui-même et le magasin ne dispose pas toujours d’une force de vente en nombre et formée.
Le merchandising est donc le relais idéal pour renseigner le client. Cristel par exemple met un fort accent dans sa PLV sur sa fabrication en France, la garantie à vie de ses produits et son engagement environnemental : « C’est non seulement une façon d’animer le rayon, mais de proposer au client une lecture différente de l’offre », souligne Damien Dodane, directeur général délégué de Cristel. « Notre PLV valorise énormément le made in France, renchérit Annabelle Geffroy, (Peugeot Saveurs). C’est le facteur le plus important dans la mise en avant de notre gamme céramique et il justifie l’écart de prix avec les produits importés d’Asie. » Le merchandising a aussi son rôle lorsqu’il s’agit de démontrer le caractère premium d’un produit. « Nous constatons une augmentation significative du sell out dès lors que nos produits sont présentés sur table plutôt qu’en broche », fait valoir Claire Gaudin, chef de produits Lagostina (Groupe Seb).
NE PAS RESTER STATIQUE
Un agencement bien réglé permet de renforcer l’adhésion à une marque, ou d’inciter le client à en tester une autre : chaque élément est donc à placer stratégiquement pour renforcer l’attrait du produit voire à en justifier le tarif. « Trouver le juste équilibre est un exercice de style, s’exclame Valérie Bignon (Casseroles & Co). Jouer sur la massification de l’offre sans que le magasin ait l’air encombré, ainsi que sur les espaces blancs... Les représentants des marques sont d’une aide précieuse pour trouver le bon compromis. Leur regard est vraiment pertinent d’autant qu’ils visitent une multitude de boutiques ! » Il n’est en effet pas nécessaire que chaque recoin du magasin soit rempli de produits : aménager des contrastes aide à valoriser certains ustensiles ou présentoirs, sans noyer le client sous un monceau d’objets, et à avoir un point focal qui guide le regard.
Astucieusement répartis dans
l’espace, les tables et les displays permettent d’inciter le client à ralentir.
Il importe pour cela que les thèmes de chacun d’eux soient cohérents
et fassent l’objet de rotations pour maintenir l’intérêt des habitués. Et
bien entendu, retravailler au moment opportun son agencement pour
« faire remonter les produits de saison (les cocottes, les planchas, etc.)
dans les zones chaudes », rappelle Lionel Debus (TOC).
Un rafraichissement régulier des présentoirs permet de maintenir l’intérêt des clients. Au magasin et ses équipes de redoubler de créativité
dans une catégorie où le nombre de marques est limité et la fréquence
du renouvellement de l’offre produit modérée. Le design du magasin
n’est dans ce contexte pas destiné à rester statique. Toutes les occasions sont propices à envisager le réagencement des présentoirs, de
la disposition et de la signalétique. Sans oublier de jouer sur la variété
des formes qui attire l’œil. « Nous changeons nos vitrines toutes les
2 semaines, témoigne pour sa part Valérie Bignon (Casseroles & Co). J’ai
remarqué que cela fonctionne parfois avec un effet retard : les chalands
ne s’arrêtent pas tout de suite en voyant le produit mais reviennent ultérieurement à la recherche de ce qu’ils ont repéré : l’ustensile a donc
bien été vu et il a marqué le client. »
Pour cela, il est aussi intéressant de privilégier des solutions modulables
pour les ajuster au fil du temps. Cela va sans dire, l’hygiène est également un aspect essentiel du merchandising qui garantit un environnement accueillant et attrayant pour les consommateurs, au même titre
qu’un réglage approprié de l’éclairage d’autant que les ustensiles de
cuisson, en inox en particulier, sont d’aspect relativement froid.
MERCHANDISING ET IMPACT ENVIRONNEMENTAL
Si une visualisation claire des produits et de leurs atouts
fait l’unanimité, il en va de même pour l’écoresponsabilité.
Avec de nouveaux défis en matière de merchandising
et de son corollaire le packaging. Nombreuses sont les
marques à réduire voire supprimer le plastique pour
privilégier les matériaux plus respectueux. « Ce sujet est
devenu ultra-sensible, important pour le consommateur
car il le rassure sur son choix », fait valoir Damien Dodane,
directeur général délégué de Cristel. Le fabricant de
Fesches-le-Châtel a par exemple imaginé pour Biome une
présentation à base de caisse en bois permettant à la fois
de jouer sur les volumes et un effet authentique et naturel,
assorti d’un dosseret pour montrer les trois cuissons
possibles du produit et son livre de recettes.
« Nous travaillons aujourd’hui à remplacer par un
fourreau en carton le disque plastifié que nous apposions
sur nos poêles antiadhérentes, poursuit Damien Dodane.
Il est impératif d’être cohérent tout au long de la démarche
et les consommateurs y sont aujourd’hui très attentifs. »
La marque Sitram (Gers équipement) qui fête cette année ses
60 ans, mène quant à elle une politique merchandising forte
pour promouvoir la bascule de la matière première primaire
vers celle recyclée. Partant du constat que la fonte, l’inox et
l’aluminium des ustensiles de cuisson sont recyclables à vie
mais que les consommateurs ne savent pas toujours que faire
de leurs ustensiles usés, Sitram développe depuis 2019 des
opérations de collecte de poêles et casseroles en grande
distribution contre remise sur l’achat d’un ustensile Sitram.
Des opérations principalement relayées sur place par de
la PLV, des kakémonos et des frontons, et couplée avec une
politique packaging en carton labellisé FSC. « Quatre ans
après la mise en place de cette opération, plus de 50 % de
nos ustensiles sont issus de matières recyclées », se réjouit
Philippe Bégué, président de Sitram.
AMÉLIORER L’EXPÉRIENCE D’ACHAT VIA LA SCÉNOGRAPHIE
Créer une ambiance renforce l’adhésion à la marque ou incite les clients
à en changer. Chaque élément est donc à placer stratégiquement pour
renforcer l’attrait du produit. « Dans nos magasins, nous essayons de
donner vie aux ustensiles de cuisson et de transposer le consommateur
chez lui avec nos produits, explique Nathalie Chabert (Zwilling France).
En 2005, à l’ouverture à Paris du premier concept shop Zwilling au
monde, un tiers de la surface a été dédié à une cuisine ouverte pour
sortir les casseroles des étagères et les mettre en scène dans un univers
“comme à la maison” pour se les approprier : un principe qui nous guide
toujours dans les ouvertures de nos boutiques. » Celui-ci a également
présidé à l’agencement de la 4e
boutique française de Zwilling qui vient
d’ouvrir au centre McArthurGlen de Giverny (Eure), à laquelle la marque a
ajouté des touches normandes dans un souci d’ancrage régional. « Dès
que la mise en avant et la visibilité de la marque sont théâtralisées, cela
porte ses fruits, remarque Philippe Gelb (Beka). C’est un levier de différenciation par rapport à internet et la concurrence, et permet à l’équipe
de vente d’apporter sa touche personnelle. Dans tous les cas, ce doit
toujours être du cousu main ! » Autre technique efficace et qui nourrit
la théâtralisation, celle du cross merchandising qui consiste à regrouper
les produits fréquemment utilisés ensemble pour développer les ventes
additionnelles. Autrement dit, créer un contexte dans lequel les clients se projettent leur permet de s’approprier l’ustensile. Lagostina, pour
stimuler la prise en main, a par exemple créé un socle spécifique pour
sa gamme amovible Salvaspazio pour inviter le shopper à essayer le
principe de la poignée, constater l’empilabilité des ustensiles. « C’est
bien plus valorisant pour la gamme et le point de vente, constate Claire
Gaudin (Lagostina). Nous ajoutons trois flyers de recettes – une entrée,
un plat, un dessert – que le client peut emmener. Nous les adaptons
aussi à la diminution de la consommation de viande et montrons la
polyvalence de l’inox. »
Enfin, si chaque magasin et chaque marque ont leur propre dynamique,
l’objectif reste le même : offrir une expérience shopping attrayante et
incitative pour le client.