Du 5 décembre au 12 janvier prochains, La Romaine Éditions prend ses quartiers à l’Hôtel des Académi
Alors que l’enquête publique relative à la demande d’indication géographique du Syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de Laguiole est close, l’association Couteau Laguiole Aubrac Auvergne annonce son intention de déposer une demande similaire pour le couteau laguiole qui serait commune aux territoires de l’Aubrac et auvergnat. L’Institut national de la propriété industrielle (Inpi) doit en tout cas trancher sur le dossier nord-aveyronnais d'ici à fin mai.
L’enquête publique pour la demande d’indication géographique, portée par le Syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de Laguiole (7 entreprises candidates, lire ici), est close depuis le 29 mars dernier. Pour autant, l’histoire ne l’est pas, car l’association Couteau Laguiole Aubrac Auvergne (CLAA) qui réunit une quarantaine de professionnels, a annoncé son intention de déposer à son tour « prochainement » une demande d’indication géographique appliquée aux produits industriels et artisanaux (IGPIA) couteau de Laguiole mais qui, à la différence de la première, serait commune aux territoires de l’Aubrac (région de Laguiole) et de l’Auvergne (bassin thiernois) fabrication du Laguiole.
Si sur le fond, ces deux entités mènent chacune une démarche qui vise à lutter contre la contrefaçon et permettre au consommateur d’avoir une indication sur la provenance du produit, la situation se révèle à plusieurs égards plus complexe.
Le Syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de Laguiole, présidé par Honoré Durand (Coutellerie de Laguiole Honoré Durand), fonde sa démarche sur le caractère géographique de sa démarche et la mise en valeur du territoire nord-aveyronnais. La demande d’IGPIA qu’il porte concerne le couteau pliant (1, 2 ou 3 pièces) et ne comprend pas les articles de table, du moins pour l’instant. « Selon l’Inpi, une indication géographique (IG) est un signe qui peut être utilisé sur des produits qui ont une origine géographique précise et qui possèdent des qualités, une notoriété ou des caractéristiques liées à ce lieu d’origine. Ainsi une IG est intrinsèquement liée à son territoire, c’est pour cela que nous avons fait une demande d’IG “couteau de Laguiole”, intimement liée à notre histoire et à celle de notre village qui a donné son nom à ce fameux couteau. »
L’association CLAA estime pour sa part qu’une IG commune aux territoires aveyronnais et thiernois est légitime : « Les territoires de Laguiole et Thiers sont indiscutablement liés depuis plus de 150 ans dans une même aventure humaine, une aventure concrétisée dans un bien à l’origine partagée, porteur d’un savoir-faire coutelier unique. Un bien qui – en vérité – n’appartient ni à l’un ni à l’autre mais bien aux deux territoires », fait valoir l’association CLAA par la voix de son président Aubry Verdier. Et de souligner leur volonté de s’unir aux membres du Syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de Laguiole afin de « faire front ensemble face à la concurrence internationale pour protéger nos savoir-faire, nos emplois et dynamiser nos territoires ».
La demande d’IG que projette de déposer l’association CLAA concernerait pour sa part le couteau pliant ainsi que le couteau de table. La production de Laguiole en Auvergne occupe en effet une place importante dans l’économie du bassin de Thiers : plus de 250 personnes en dépendent selon l’association CLAA. Le laguiole représenterait 50 % du chiffre d’affaires des principaux fabricants du bassin thiernois et 80 % de leur chiffre d’affaires à l’export. « La perspective d’une IG couteau de Laguiole “sans Thiers” pourrait mettre le bassin thiernois en grand danger. Le laguiole est incontestablement un des piliers de la production du bassin, en particulier à l’export, souligne Aubry Verdier. Une IG couteau de Laguiole “sans Thiers” créerait une concurrence déloyale sur le marché, un précédent extrêmement négatif pour l’ensemble des productions coutelières thiernoises et un déséquilibre dans l’organisation de la coutellerie française dont Thiers est la plaque tournante et le pilier ».
De son côté, le Syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de Laguiole qui recense environ 220 salariés (soient 93,6 % des emplois du secteur dans le nord Aveyron), espère outre la clarification pour le consommateur, une préservation de l’activité manufacturière du village et de l’emploi des générations futures. « Nous espérons qu’une demande d’IG couteau de Thiers sera déposée, mettant ainsi en valeur le territoire thiernois et le pluralisme de l’artisanat coutelier français, explique Honoré Durand. Les couteliers de Thiers et ceux de Laguiole ont chacun un savoir-faire qui leur est propre. Nous, nous défendons celui de Laguiole et du Nord-Aveyron, reconnu dans le monde entier depuis des décennies. Notre savoir-faire fait partie intégrante du rayonnement de notre territoire, il est l’un des vecteurs principaux du tourisme local. Les artisans de Thiers ont une approche différente de la nôtre avec un savoir-faire qui s’étend à la fabrication de couteaux de toutes les régions (tels que les couteaux de Corse par exemple) et non d’un territoire défini. À Laguiole et dans le Nord-Aveyron, les artisans de notre syndicat investis pour la demande d’IG, fabriquent notamment des couteaux de Laguiole faits de A à Z sur le territoire, et seuls ces couteaux bénéficieront du label. »
L’Inpi devrait rendre son verdict d’ici à fin mai concernant la demande d’IG du Syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de Laguiole.
Photo : © CLAA